Au début c’était simple, avec un rapport de force entre la direction qui disposait du financement, et les soignants qui avaient les patients en charge, opposant cet argument aux réticences du Directeur …
Mais le coût croissant des dépenses de santé lié en grande partie aux progrès de la Médecine, mais aussi aux transformations de la société et, certainement aussi à des dysfonctionnement dans l’organisation, a conduit à se poser la question des économies à réaliser.
l’idée est alors de réduire l’offre en espérant ainsi diminuer la demande, d’où le numerus clausus, la réduction des lits, la fusion des hôpitaux, la limitation des structures de proximité … (certaines décisions se justifient aussi par les exigences des progrès médicaux incitant à regrouper les actes techniques très spécialisés et à garantir la permanence de soins de qualité)
Le personnel médical s’est alors vu offrir la possibilité (voire l’obligation) de prendre part à la gestion administrative de l’hôpital, ce qui était très judicieux de la part de l’Administration qui partageait ainsi son embarras et son impuissance.
Par ailleurs il s’est trouvé suffisamment de médecins, désireux de pouvoir et/ou trop confiants, pour s’engager dans cette voie.
Progressivement on a voulu gérer l’hôpital comme une entreprise en cherchant la performance et la rentabilité, en oubliant que les « clients » étaient des « malades » différant quelque peu des consommateurs habituels.
L’idée qu’il puisse y avoir des groupes homogènes de malades (GHM) correspond souvent trop peu à la réalité du terrain. Cette notion prend mal en compte des notions peu quantifiables comme l’énergie déployée dans le soin, le temps passé à l’écoute du malade et de ses proches, à discuter d’un dossier avec des confrères, etc …
Cette gestion comptable de l’hôpital a conduit à augmenter fortement la présence de l’Administration qui a introduit la nécessité de multiples comités avec chacun leurs réunions, leurs présidents, secrétaires, compte-rendus, etc …
Tout n’est pas négatif dans cette transformation vécue par l’hôpital … On a surement progressé dans certains domaines en terme de sécurité, d’efficacité … Ainsi l’informatique médicale, qui demande un investissement en temps notable, permet aussi parfois d’en gagner …
On voit par contre que le médecin et l’infirmier(ère) peuvent consacrer de moins en moins de présence à leurs malades.
Même au sein des équipes la communication est difficile, chacun étant occupé sur son ordinateur à prescrire, à contrôler, à valider …
Il est sur que, jadis, la visite au lit des patients, en compagnie de leur infirmière, pouvait avoir des insuffisances mais elle avait au moins le mérite pour les malades de les mettre en présence d’une équipe et de permettre des questions, des explications, des échanges …
Quelles solutions proposer?
Le sujet mérite avec urgence une réflexion large, approfondie, démocratique, abordant les rôles respectifs de la médecine de ville, du secteur hospitalier privé, des urgences, et la tâche est immense.
Mais d’emblée il ya des impératifs évidents, redonner à la médecine de ville toute sa place, organiser le recours aux soins urgents pour éviter la surcharge hospitalière, trouver un mode de financement de l’hôpital adapté …
La crise actuelle aura, espérons le, le mérite de montrer les directions à prendre …
Il faut que les soignants se sentent à nouveau utiles et capables de réaliser le métier qu’ils aiment, qu’ils puissent rentrer chez eux après leurs heures de travail en ayant le sentiment d’avoir bien effectué leur tâche, ce qui n’est assurément pas le cas à l’heure actuelle.